Les rires et plaisanteries s'échangent aisément à "A Sporta", depuis que Nathalie et Cyril Van Copenolle ont repris cette épicerie sur la place de l'église.
Une aventure entrepreneuriale
Cela fait un peu plus d'un an que ce couple originaire de Metz a tout quitté pour tenir ce petit commerce. Elle, son travail d'assistante de direction. Lui, son atelier de manutention de batteries. "Pendant le Covid, on s'est dit : pourquoi ne pas venir habiter en Corse ?", se souvient Cyril Van Corolle. Après tout, cela faisait vingt ans qu'ils sillonnaient l'île chaque été. "Je suis retourné au travail après le confinement, mais je disais à ma femme, 'regarde sur SOS villages s'il n'y a rien à reprendre en Corse'", retrace le commerçant, évoquant l'opération solidaire de la chaîne TF1. A Sporta cherchait un repreneur et les Van Copenolle n'ont pas tardé à croiser le chemin de ce petit commerce.
Une ouverture empêtrée dans les restrictions anti-Covid plus tard, les apprentis épiciers avaient touché du doigt la réalité du métier. "C'est une véritable aventure entrepreneuriale", assure la commerçante. "On ne se rend pas compte de ce qu'il y a derrière le statut d'épicier, on est très loin du rêve de gosse de jouer à la marchande." Gérer les fournisseurs, les contrats, les commandes et les clients est leur nouveau quotidien.
En complément des choix classiques, les propriétaires ont pris le pari de proposer des produits plus raffinés et d'origine locale.
Sur les rayons, les conserves de haricots côtoient les vinaigres aux fruits corses. "Nous avons cherché à étoffer cette gamme locale, pour la faire découvrir aux Corses eux-mêmes, pas seulement aux touristes", détaille Nathalie Van Copenolle. En plus des viandes et plats cuisinés livrés par des artisans de L'Ile-Rousse, les villageois ont le droit aux baguettes et viennoiseries tous les matins.
Au service des habitants
"Nous avons été bien accueillis, s'enthousiasme l'épicière. Il y avait un vrai besoin des habitants, en particulier pour les livraisons de paniers à domicile". Le centre du village est connu pour son centre difficilement accessible en voiture.
Le couple s'est bien implanté, mais les objectifs financiers, eux, n'ont été que modestement atteints. "Si on veut vraiment vivre de notre activité, il y a encore du travail, livre Nathalie Van Copenolle. Il faut aller chercher les clients et les fidéliser, leur montrer qu'il y a des produits et des services ici qu'on ne trouve pas ailleurs."
Pour cela, le couple n'a lésiné sur aucun détail : une imprimante pour les photocopies et impressions, des colis de produits corses à livrer sur le continent durant l'hiver et des glaces à emporter l'été. "On pourrait être une épicerie qui ouvre d'avril à octobre, insiste la propriétaire. Mais ce que l'on veut c'est être là à l'année, au service des gens." D'ailleurs, les commerçants ouvrent l'œil sur les habitudes des uns et des autres - une marque de conserves préférée ou un légume favori - et adaptent leurs commandes en conséquence. "Il faut toujours pouvoir répondre au client", répète l'épicière d'un air assuré.
Dans ces quelques mètres carrés bien ordonnés, le proverbe "mieux vaut trop que pas assez" est de rigueur. Une philosophie cultivée auprès de la première propriétaire de cette épicerie, ouverte dans les années 1960. À 84 ans, elle vit toujours à Monticellu et profite de ses livraisons de paniers à domicile pour prodiguer quelques précieux conseils à ses successeurs.
Depuis quelque temps, les habitants des villages alentour, Belgodère ou Corbara, viennent piocher dans les rayons bordant la place de l'église. Mais le vrai symbole de réussite, selon la commerçante, "c'est de voir les enfants acheter des bonbons après l'école".